Fédéral
18 Juillet 2003 

Conférence Annuelle du Conseil  (2003)
Interview d'Alain Donzeaud, Président de Syntec Conseil en Management

La Conférence Annuelle du Conseil organisée par Syntec Conseil en Management était le moment idéal pour dévoiler les résultats de l'enquête annuelle menée par la fédération professionnelle sur le conseil en France. A cette occasion Alain Donzeaud répond à nos question et fait un bilan du secteur

Alain Donzeaud, la Conférence du Conseil vient de se clôre sur le constat d’une crise du conseil que corrobore les chiffres de votre enquête annuelle. Quels enseignements peut-on déjà tirer des données dont vous disposez ? 

Alain Donzeaud : Nous venons de sortir les résultats de l’enquête annuelle. Elle est en cohérence avec les études précédentes et montre à la fois la structuration du conseil français et son état. Entre 2001 et 2002 ce marché a enregistré une baisse de 4 %. Depuis que nous regardons les chiffres nous n’avons pas souvenir d’une croissance inférieure à deux chiffres ! La croissance 2000 - 2001 était de 17% alors qu’en fin d’année 2001 on avait déjà enregistré un ralentissement. En 2002 on s’attendait à +7% et l’on a fait - 4 % . Donc on s’est pris  -11% par rapport aux prévisions.   Pour 2003 la croissance économique prévue étant de 2%, on sera en dessous de cela.  Donc cette année est la suite de la crise.


Mais selon votre enquête tout le monde n’est pas logé à la même enseigne

Alain Donzeaud : Ce qu’il faut dire c’est que suivant la taille les croissances sont différentes. Les petites sociétés, nombreuses et dont le nombre augmente mais qui ne représentent qu’une faible part du marché, enregistrent encore de la croissance ! Les grands groupes à contrario enregistrent de la décroissance.  


D’où globalement une décroissance. A-t-on une idée claire de ses origines ?

Alain Donzeaud : La décroissance est due à deux effets. D’une part la diminution du nombre de projets, notamment les gros projetsde transformation. D’autre part l’effet des prix résultant de la rareté de la demande et de la pression des Services Achats. D’où un marché qui se rétrécit.


Cela devrait-il durer ? quelle est votre vision à 2-3 ans ?

Alain Donzeaud : On espère être au bas de la courbe. Je le pense mais nous n’avons pas encore vu les signes d’une remontée. En 2003 on va rester bas. Les effets de « sas » seront pour 2004-2005. 2à02 n’était pas une bonne année, 2003 non plus. Pour 2004 on espère une année de reprise et revenir à la nomrale en 2005


Revenir à la normale supposerait que le monde du conseil n’ait pas changé. Qu’en est-il de ses évolutions ?

Alain Donzeaud : Le conseil est un métier d’offre. C’est ce que l’on a toujours dit. Or cette offre est proposée à des clients qui changent. Donc l’offre change. Depuis 30 ans j’ai vu profondément changer l’offre de conseil suite au changement de mes  clients. Le drive du changement de l’offre c’est l’évolution de l’attente et de la demande du client. Elle évolue de plusieurs façons : d’une part les clients dans le mécanisme d’analyse et d’expression des problèmes sont beaucoup plus sophistiqués qu’ils ne l’étaient notamment par la présence dans les entreprises de cadres en provenance des sociétés de conseil. En 10 ans notre profession a du injecter non loin de 10 000 consultants dans les entreprises. Ainsi la manière de poser le question s’est considérablement éllaborée et renvoi les consultants à la nécessité d’être au même niveau. Rappelons qu’un client dit plus ou moins « étonnez moi, rassurez moi, engagez vous » ! Deuxièmement il y a transformation en ce sens que la demande du client s’est orienté préférentiellement vers des prestataires assembliers. Avant on découpait par matière et le client restait maître d’ouvrage. Aujourd’hui on attend des résultats sur une capacité assemblière. Enfin troisièmement l’entrée forte de la technomogie comme élément de compétitivité (gestion de production, internet, places de marchés...) ce qui permet des changements de processus d’où une réflexion du client sur les impacts en terme de métier et leurs atouts concurrentiels. Il y a donc une attention nouvelle qui porte sur les effets de levier.
Pour ces trois raisons le métier de consultat va devoir évoluer et notamment en fonction de la taille de l’entreprise car le client fait en plus du shopping auprès des petites sociétés expertes.


D’où des changements importants pour la profession de conseil, mais y a-t-il pas cependant des invariants qui apparaîssent ?

Alain Donzeaud : Ce qui ne change pas c’est la posture du consultant sur deux sujets : le fond, à savoir la capacité à avoir un œil critique sur le choses et la forme, à savoir la capacité à mettre en place des solutions. Ainsi le client ne s’attend pas à une vente de services mais essentiellement à une capacité critique. Ensuite vient le développement des ressources. Il existe ainsi un cercle vertueux clients-projets-consultants qui fait que l’on produit les consultants nécessaires sur la base des projets que l’on a génèré. Et là dessus il y a une demande et une exigence très forte de la part des clients à amener les consultants qui vont aller bien dans le projet. C’est paradoxalement là que se situe la source de changement pour le conseil. 


Toutes ces évolutions qui n’ont pas été immédiates n’expliquent certainement pas la rapide évolution à la baisse du marché du conseil ?

Alain Donzeaud : La raison du creux c’est essentiellement l’économie ! Les entreprises ayant été confrontées à une crise sont devenues plus exigeantes dans leurs mécanismes d’appel et de sélection. Notamment au travers de leurs Directions Achats, mais pas seulement. Il y a eu aussi une forme de rupture entre l’attente sur l’informatique et les résultats. La conjoncture a rendu ces questions plus émotionnelles qu’elles ne le sont.


Ce qui nous amène aux débats entre clients et consultants qui ont eu lieu lors de la seconde Conférence Annuelle du Conseil organisée par le Syntec. Peut-on esquisser un premier bilan ?

Alain Donzeaud : Très positif ! On a eu une assistance de plus de 100 personnes sur l’intégralité de la journée. Oui vraiment beaucoup de monde.  Ensuite chacun s’est accordé à trouver les tables rondes intéressantes et riches d’enseignements notamment par la présence d’hommes d’entreprise. D’autre part on a pu mettre en scène le Syntec Conseil en Management de façon explicite. Enfin on a mis en scène de manière explicite les métiers du conseil sans avoir peur d’aborder les difficultés rencontrées, notamment dans le domaine de la tarification. Mais ce qui est le plus important c’est peut-être le constat que cette profession qui s’est industrialisée est arrivée à un stade d’organisation collective ! C’était le cas au Royaume Uni et en Allemagne mais pas ailleurs. C’est désormais le cas en France où le cap a été franchi depuis 1 à 2 ans. Donc bilan très positif d’autant que c’est le premier événement pour la profession en présence de ses clients. On attend une mesure plus précise de l’évaluation et l’ on projette déjà de faire la prochaine conférence probablement autour de fin 2004.


Un bilan  positif  mais comment le resituer  par rapport aux attentes des membres du Syntec et d’une manière générale du monde du conseil dont certaines préoccupations se portent aujourd’hui sur la globalisation, sujet peu abordé ?

Alain Donzeaud : Dans les adhérants nous avons 3 types d’entreprises : les multinationales du métier couvrant plus de 60% du marché français et opérant dans le monde. De petites sociétés opérant sur des marchés locaux et qui possèdent la capacité d’accompagnement des clients hors de France au travers de partenariats d’alliance ou encore la constitution d’un réseau de filiales.  Et enfin des sociétés agissant d’une mainère essentiellement plus locale. Aussi c’est de 70 à 80 % du marché qui est réalisé par des sociétés ayant des capacités à l’international. Aussi la question de l’internationalisation dans un monde en globalisation  n’est pas nouvelle pour eux. Pour la pluspart je ne considérerai même pas comme vrai la nécessité de participater à des cercles internationaux. 


La participation  à des cercles thématiques est une tradition au Syntec. Pour conclure peut-on connaître les thèmes nouveaux qui feront l’objet des réflexions à venir sur la profession ?

Alain Donzeaud : Nous n’avons pas encore fixé ces thèmatiques émergeantes. Nous le ferons en juillet à partir des résultats de la conférence. J’ai cependant identifié 3 groupes de préoccupations : d’une part un ensemble dans lequel je regrouperai le développement durable, l’administration, le secteur public et le partenariat Public-Privé.  Il existe déjà un groupe de travail sur cet ensemble autour de Jean Luc Placet (Vice Président). Ensuite un thème qui serait « comment gérer le changement dans un univers turbulent ». Enfin es systèmes de rémunération des prestations et l’achat de conseil. Pour l’avenir nous maintiendrons par ailleurs un axe de travail antérieur : le Label Syntec.

Propos recueillis par Bertrand Villeret



Pour Info:

http://www.syntec-management.com

Biographies: 

Alain Donzeaud
Jean Luc Placet
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Image Alain Donzeaud