Fédéral
Oct 2010     


Interview : John Furth, Président de l' AMCF


En décembre 2009, le 63 ème “Annual Meeting” de l’AMCF à New York était l’occasion propice à une première rencontre avec le nouveau Président de l’AMCF, John Furth, ancien consultant et spécialiste du conseil en Asie et en Europe. Le prochain “Global Leadership Forum” qui doit se tenir à New York approchant et sa conférence satellite, the European Leadership Forum, étant elle-même en vue, il nous a semblé que le moment était enfin venu de mettre à jour nos tablettes et de présenter John Furth à nos lecteurs… 


John, vous êtes le nouveau Président de l’AMCF, l’association des sociétiés de conseil en management, et votre expertise concerne très précisément le domaine du conseil pour lequel vous avez une longue expérience passée auprès de firmes telles que Roland Berger Strategy Consultants ou encore Accenture pour lesquelles vous avez œuvré en Europe et en Asie, avant de revenir vers Roland Berger, le plus grand cabinet européen, et de finalement rejoindre la direction de l’AMCF en janvier 2009 comme Président. Cependant les consultants en France, et certains en Europe, ne vous connaissent pas encore. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?


John Furth : Je vois que vous connaissez votre sujet déjà très bien (rires). J’ai commencé ma carrière chez Roland Berger Strategy Consultants et ma plus grande mission a été auprès de la Commission Européenne. Là se trouve mon lien avec l’Europe.  Ainsi, au départ j’ai œuvré pour les Européens puis je me suis embarqué pour le Japon. Ma carrière est donc très internationale.


Et vous êtes celui qui a ouvert le bureau de New York pour Roland Berger …

John Furth : C’est exact ! En 1996.


Doit-on en déduire que vous devriez-être en tant que président particulièrement ouvert aux sociétiés de conseil européennes ?

John Furth : Bien sûr, extrêmement. Nous avons déjà des membres européens. Historiquement nous avons développé notre activité  il y a déjà bien longtemps et nous avons depuis lors des membres européens tels que Capgemini, Algoé, BPI, des participants de longue date, et aussi d’autres cabinets dont l’origine est européenne: Deloitte, Ineum [devenu depuis Kurt Salmon]…et je dirai [par extension] du monde entier, avec de grands noms comme TCS…


Serez-vous aussi porté à déveloper vos activités un peu plus vers l’Europe et le reste du monde?

John Furth : Eh bien en fait nous sommes très américano centrés. Cela dit nous avons développé des activités au niveau mondial comme des séminaires, des forums, en Europe et en Asie principalement… mais de même [qu’en Amérique nos membres s'occupent d'Amérique], nos membres en Europe s’occupent de leurs activités Européenne… Et donc pour ce qui est d’ici, nous sommes principalement concentrés sur l’Amérique.


En 2003, Lanny Cohen, Président du meeting annuel, nous avait exposé l’historique de l’association AMCF dont l’origine date de 1929, l’année même de la grande récession. Il nous avait décrit la structuration de ses membres comprenant au départ des stratèges, puis le relai réalisé par les sociétés de conseil en management et finalement l’arrivée des grandes firmes d’informatique et des grands de l’Impartition (Outsourcing, BPO, Offshoring) à la fin du 20ème siècle. Quelle pourrait bien être la prochaine race de société rejoignant l’association ?

John Furth : Nous observons l’arrivée des Niche Players. Des niche players locaux, dans les domaines du marketing, de la communication, des relations publiques, de l’organisation, des services financiers, de la santé, de la promotion immobilière, etc... Donc [nous avons] des niche players “Et” des grands généralistes, de grandes compagnies. Ceci est une de nos spécificités. Nous accueillons en même temps de grandes compagnies et des petites sociétés.


Et là, en dépit de la crise, de nombreux nouveaux membres rejoignent l’association actuellement, pratiquement un nouvel entrant par mois, à peu de chose près…

John Furth : C’est exact. De nouveaux de diverses sortes, des niche players bien sûr et aussi d’anciennes grandes sociétés membres qui n’hésitent pas aujourd'hui à revenir vers nos conférences et nos forums : PwC, TCS, Mercer LLC… et Parmi les niche players nous avons Campbell Alliance (basé à Raleigh NC) specialisé dans la santé et l’industrie des biotechnologies ; Gray Matters de Chicago, specialisé dans la formation aux méthodologies commerciales pour les services intellectuels ; Target team (basé à Boston) dont les solutions sont utilisées par plus 40 cabinets; PepperCom, une agence en communication stratégique ; PDN aussi, un cabinet londonien, spécialisé dans la formation tout comme  Exec Com de NewYork City. Et finalement je citerais le Hokenson Group, un cabinet de développement et d’alliance stratégique de Washington DC. Au moment du forum européen (le 16 nov 2010) nous aurons 48 sociétés membres (54 si l’on compte toutes les filiales du MCG, le Management Consulting Group). Et ceci inclut une nouvelle catégorie “Start-ups” comprenant maintenant de toutes petites sociétés de 2 à 3 personnes lesquelles commencent tout juste leur plan de croissance.


Comment voyez-vous l’AMCF aujourd’hui ? Est-ce un club d’élite comme certains le pense vu d’Europe ?

John Furth : Ce n’est pas un club. C’est un endroit où les gens viennent pour travaille ensemble. Nous sommes bien plus qu’un club et nous sommes définitivement autre chose qu’un club fermé. Nous avons de nouvelles sortes de catégories, d’événements et de services.


Parmi vos premières actions en tant que président nous avons observé la sortie d’un nouveau site web. Que peut-on dire de cette plateforme ? Est-ce un nouvel outil pour vos membres ? 

John Furth : Oui. Nous l’avons développé avec une équipe de Capgemini. Il repose sur une technologie Joomla et de nouvelles fonctionnalités apparaissent chaque mois. Nous avons aussi des rubriques réservées uniquement à nos membres.


Il y a quelques années, au meeting annuel de l’AMCF, les gens s’accordaient, notamment ceux du BCG, à dire que l’on n’avait pas observé récemment de nouvelles idées dans les domaines du management et du conseil. Après le passage à l’an 2000 (Y2K) toutes les idées telles que la Qualité, le Reegineering, l’e-Business, le BPO, l’Offshoring, de même que le Coaching ou encore l’Agilité dans les RH semblaient déjà devoir être rangées parmi les accessoires de l’histoire managériale avec aucun substitut notable en vue. Quel est votre sentiment à ce sujet ?

John Furth : Actuellement nous n’avons aucun sujet sur lequel on puisse capitaliser. Les nouvelles idées sont limitées aux spécialités. Je ne pense pas que qui-que-ce soit actuellement puisse entrevoir le moindre sujet majeur, la moindre idée majeure. Les entreprises restructurent, se développent à l’étranger, mais vous avez raison et les gens [mentionnés] aux meetings avaient raison lorsqu’ils faisaient observer cette absence de nouveaux concepts. Ceci ne veut pas dire que les cabinets conseil n’auraient pas pour autant quelques grandes idées qu’ils garderaient jalousement secrètes au sein de chaque firme, mais qu’aucune grande idée n’a récemment diffusée au sein de notre profession. Cela dit j’observe que les gens travaillent dur dans les réunions entre pairs et dans les groupes d’affinité afin justement de compenser ce manque de grandes méthodes et de lignes directrices [nouvelles] et je pense qu’ils essaient de trouver entre eux des solutions plus collaboratives que révolutionnaires.


Doit-on trouver ici la raison pour laquelle vous avez choisi David Maister comme conférencier invité pour le meeting annuel 2009. Et n’était-ce pas là un choix un peu risqué pour le nouveau président car on sait David Maister être un homme qui, en conditions stratégiques, ne mâche pas ses mots ?

John Furth : Actuellement David Maister est l’un des tous meilleurs parmi les trois ou quatre plus importants penseurs et conférenciers de notre domaine de l’industrie du conseil, notamment de par son approche très orientée vers l’être humain, et [un conférencier] qui n'est pas seulement issu du conseil académique. Il a l’esprit très ouvert et il représentait l’homme idéal pour ce moment particulier. Donc cela est sans rapport avec un quelconque risque et ce d’autant qu’il était bien connu de nos membres. Et comme pour l’année 2009 le titre était “An industry in Change”, David Maister et Richard Metzler étaient vraiment les hommes de la situation. Richard est aux côtés de l’association depuis près de 30 ans, très protecteur. Donc, David Maister, excellent, brillant selon moi, et Richard, exceptionnel pour nous… Ils étaient donc définitivement les deux meilleurs témoins pour cette année de changement. Donc aucun risque. Notre industrie se restructure et certains domaines méritent toute notre attention : les Communications, l’Energie et l’Environnement, le secteur Automobile et la Santé.  Nous avons ainsi eu des sessions et des conférences sur ces sujets. Et pour ce qui est de savoir comment les consultants peuvent ajuster leurs pratiques afin d’aider ces divers secteurs, David était incontestablement la bonne personne.


Et David Maister devait être aussi le lauréat du Prix Sloane pour l’excellence dans le domaine du conseil en management, qu’il devait recevoir des mains mêmes de Richard Metzler. Pouvez-vous nous rappelez les noms des principaux récipiendaires de ce prix très convoité ?

John Furth : Roland Berger, a été le premier lauréat (en 1999), un homme très intelligent, très ambitieux, Roland Berger Strategy Consultants est la plus grande société de conseil européenne. Il devait être présent cette année mais comme il est très occupé il n’a pas pu venir. Pour ce qui est de la liste je dirai : Mike Hammer, Edward de Bono, inventeur de la méthode des 6 chapeaux, en 2005, Ginni Rometti, Vice Présidente d’IBM in 2006, C. K. Prahalad de l’University du Michigan en 2007,  Henry Mintzberg de l’Université de Sherbrook au Canada en 2008, et finalement David Maister, ancien Professeur de la Harvard Business School et [connu pour être] le « consultant des consultants ».


Comment résumeriez-vous l’AMCF meeting 2009 ? En termes d’état de l’économie, d’état de l’industrie du conseil, de qualité du colloque et de choix des sujets ?

John Furth : Permettez-moi de commencer avec les sujets. Nous avons choisis diverses industries parce qu’elles sont en difficulté actuellement et parceque c’est là que les consultants peuvent aider au mieux. Donc c’est là que le conseil peut apporter un changement significatif et là où le gouvernement peut apporter un appui à ce changement, tout spécialement dans les secteurs de l’Energie et de la Santé. L’Automobile a des problèmes en ce moment partout dans le monde alors que la Santé est un problème essentiellement US et lié aux politiques de [l’administration] Obama. D’autres sujets méritaient d’être choisis en rapport à la récession économique. Internet et les Télécommunications de même que l’Energie qui sont des secteurs solides bien que mis à mal par la récession. Nous aurions pu ajouter la Distribution et L’Immobilier qui sont de grosses industries aux USA. Maintenant en ce qui concerne l’état de l’économie et du conseil je dirai que l’industrie du conseil doit se revigorer. Nous devons sortir de nouvelles idées intéressantes et de nouvelles méthodologies. Pour ce qui est de l’état de l’économie, je dirai que ce sera difficile. L’année 2010 [et probablement 2011] sera difficile, et il en sera ainsi en Europe. Nous sommes [ici] au début d’un rétablissement mais c’est très difficile et d’une certaine manière différent de ce qu’on observe en Europe. Pour ce qui est du meeting lui-même je suis très heureux de pouvoir dire que 2009 fut un excellent millésime, très positif en terme d’énergie, avec des participants très enthousiastes ; Et il a permis de dégager une vision exacte de l’état du conseil ; Et je le résumerai comme suivant : La prochaine grande idée n’est pas encore là ! Et comme cela a été observé par les gens de Kennedy Information, le conseil est une industrie mature et comme toute industrie mature elle a certainement besoin de se réinventer elle-même. Et ça c’est vraiment le grand sujet sur lequel nous aurons à travailler lors des prochains séminaires et forums.


… conclusion qui m’amène élégamment à notre question suivante : Pour le prochain Leadership Forum (nouveau nom donné à l’Annual Meeting) qui doit se tenir les 2 et 3 décembre 2010 à l’University Club de New York, Peter Shiff d’Europacific Capital, Jeremy Siegel de la Wahrton School et James Champy, consultant internationalement reconnu, seront les vedettes du moment - James Champy devant être au passage le lauréat du Sloane Award. Ma question serait donc la suivante : alors même que James Champy est l’inventeur avec Michael Hammer du “Reengineering”, doit–on voir dans cette "distribution" un lien avec le manque temporaire de “grande idée” que nous avons évoqué ?

John Furth : [Cette recherche d’idée nouvelle] est toujours un sujet pour nous. Mais vous n’avez pas mentionné le Professeur Bob Eccles de la Harvard Business School. Celui-ci s’entretiendra avec nous dans le cours du colloque sur ce qu’il pense être "la prochaine grande idée" à apparaître dans le conseil.


Juste quelques semaines avant le forum de New York se tiendra à Paris le 16 novembre 2010 le "European Leadership Forum", précisément au siège de Deloitte à Neuilly. Là aussi vous proposez une magnifique liste de panelistes dont Brad Smith de Kennedy Information, Rick Carter du cabinet Equation Consulting, spécialiste de la Santé, Gérard Debrinay Président d’Algoé et Christian Chattay, Partenaire de Deloitte France. Pourriez-vous dévoiler pour nos lecteurs les sujets qui pourraient être abordés par ces experts de talent ?

John Furth : Nous allons beaucoup parler de ce que les clients ont besoin et attendent de leurs consultants. Nous allons aussi beaucoup évoquer l’état de l’industrie du conseil, tout spécialement en Amérique du Nord et en Asie. Les Européens sont toujours friands de savoir ce qui se passe en dehors de leur propre térritoire.


John, cette année nous avons vu Ineum fusionner avec Kurt Salmon, Watson Wyatt fusionner avec Towers Perrin et finallement Hewitt fusionner avec Aon Consulting. En guise de question finale nous aimerions connaître votre sentiment sur ces rapprochements et méga - fusions. Est-ce le début d’une vague de consolidation, comme notre industrie en a l’habitude, ou bien est-ce le signe de la fin de la crise ?

John Furth : Les fusions et les acquisitions (M&A,Merging & Acquisition) sont toujours le moyen principal d’augmenter sa part de marché ou encore de réduire ses coûts pour une industrie qui devient mature telle que la notre. Aussi je m’attend à ce que nous voyons beaucoup de ce type d’activités dans les toutes prochaines années.  .

Monsieur le Président, au nom de nos lecteurs, je vous remercie beaucoup pour cette vue d’ensemble et pour ces commentaires d’un très grand intérêt. Merci John.


Propos recueillis par Bertrand Villeret,
Rédacteur en chef, ConsultingNewsLine



Image :
Courtoisie AMCF

Version en anglais :
UK


Whoswoo :
John Furth

Pour info :
http://www.amcf.org




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