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21 Mars  2016 

Présidentielle 2017
Grand Débat sur TF1 : Avantage à François Fillon
C'est donc de manière très inéquitable que le Grand Débat sur TF1 s'est déroulé le lundi 20 mars jusque tard dans la soirée.  5 candidats se sont en effet affrontés, 3 de gauche (Mélanchon, Macron, Hamon) et 2 de droite (Fillon et Le Pen), alors que les 6 autres prétendants à la présidence, Dupont-Aigan en tête, déjà écartés de facto du show à l'américaine des primaires, ont été évincés de cette grande soirée de l'entre-soi républicain. Mais ce qui devait être un booster pour la gauche héritière du difficile bilan de François Hollande, s'est transformé en un plébiscite de forme pour la droite. Ainsi, malgré un spectacle des plus enjoués donné par le représentant de l'extrême gauche, Jean-Luc Mélanchon, les prestations très moyennes des 2 candidats qui se partagent la représentation socialiste officielle, Benoît Hamon pour le "canal historique" et  Emmanuel Macron pour la "filière libérale", ont donné au bout du compte un très net avantage à une Marine Le Pen plutôt disciplinée et surtout à un François Fillon calme et déterminé. Notre évaluation...
Présidentielle 2017
 Image :  TF1 sur écran de télévision. Consultingnewsline 2017

C'est donc à une soirée politique étonnante à laquelle nous avons été conviés d'assister sur TF1 lors du "Grand Débat" animé par Gille Bouleau et Anne-Claire Coudray le lundi 20 mars 2017. Les 6 candidats représentant des groupes politiques "mineurs", Nicolas Dupont-Aignan (Debout La France),
François Asselineau (Union Populaire Républicaine), Jacques Cheminade (Solidarité & Progrès), Nathalie Arthaud (Lutte Ouvrière), Philippe Poutou (Nouveau Parti Anticapitaliste) et Jean Lassale (Résistons ! ) ayant été évincés purement et simplement des plateaux de TF1, on a donc assisté le lundi 20 mars aux joutes à fleuret moucheté entre les 5 protagonistes prinicpaux de la campagne présidentielle 2017. A croire que pour ce centième anniversaire de la catastrophique révolution russe on en soit arrivé en France à séparer les bolchéviques (majoritaires) des mencheviks (minoritaires). Ambiance quelque peu tendue sur le plateau, surtout au début, pour les 5 élus de TF1 dont certains ont su se lâcher à l'instar d'un Jean-Luc Mélanchon (France Insoumise, la branche campagnarde du Front de Gauche) très en verve comme à son habitude, d'autres qui sont restés dans une certaine retenue comme François Fillon (Les Républicains) ou Marine Le Pen (Marine Présidente, alias de campagne du Front National) et ceux enfin qui ont déçu par un amateurisme qu'on ne leur prêtait pas, Emmanuel Macron (En Marche ! la filière libérale du Parti Socialiste) et Benoit Hamon (Parti Socialiste "canal historique"), d'ordinaire plus à l'aise devant un public qui leur est conquis d'avance.

Une évaluation sur la forme
Notre lectorat étant constitué essentiellement d'entrepreneurs utilisateurs du conseil, de consultants et d'auditeurs dont c'est le métier, ainsi que de nombreux candidats à  la carrière de consultant, nous ne leur ferons pas l'offense d'entrer dans un débat de fonds sur  les programmes de chaque candidats et nous contenterons de donner un avis sur la qualité de la communication des 5 candidats, basé sur l'usage d'une grille d'évaluation qui vaut ce qu'elle vaut et que chacun pourra "renormaliser" à sa guise :

Les critères retenus sont au nombre de 10 pour des notes comprises entre 0 et 2, doit donc 0 si ce n'est pas bon, 1 si c'est passable, et 2 si c'est bien voire très bien... D'où des notes globales comprises entre 0 et 20, et le tableau suivant pour lequel les candidats sont alignés dans l'ordre de leurs résultats (scoring):


Critère


F.Fillon

 JL.Mél

M.LePen

 E.Macron
 
B.Hamon
1  Réponse aux questions
 
   Promptitude, pertinence...
2
2
1
2
2
Clareté du projet
    Transparence, cohérence, crédibilité...
2
1
1
2
1
Mise en avant des points forts % faibles
   
Précision, éclairage, attenuation
1
1
2
1
0
Attaque des projets concurents
  
Pics, sens de l'opportun,.dérision.
2
2
2
0
0
Esquive des attaques
    Réactivité, contournement des pièges, rebond...
2
1
2
0
1
Création de surprises
    Effets d'annonce, évaporation des malentendus..
0
2
1
0
0
Dans le sujet ou hors sujet
    Recentrage du propos, explosions...
2
2
1
0
1
Tenue sur scène
    Calme, gestuelle, tonicité, regard, échange....
2
2
2
1
2
Prestance globale - présidentialité
    Impression, cohérence geste-propos,charisme
2
2
1
2
1
10 Propos de conclusion
    Clareté, concision,
sens de l'effet, rémanence...
2
1
2
0
1

    Total


17

16

15

10

09


And the winner is ...
Avantage donc à François Fillon qui aura su donner une impression de calme et de souveraineté qui n'est apparu chez aucun autre candidat. Ses réponses étaient précises et nettes sur la base d'un programme déjà bien établi dont il connaissait visiblement tous les rouages et les réajustements les plus récents comme tous les modes de financement, au point de pouvoir intervenir ponctuellement dans le discours des autres en leur objectant que "ça ce n'est pas finançable" (en substance). Sa conclusion où il rappelait aux débutants de la politique qu'il avait exercé tous les postes d'élu que notre république compte était parfaite. Il reste que le déroulement du débat, où les organisateurs ont d'une certaine manière évacué les questions frontales sur l''Union Européenne, l'immigration, la dette ou encore la géostratégie trumpoutiniene, n'ont guère permis d'évaluer la cohérence de son programme, ni de le voir poussé dans quelques retranchements au cas où l'union s'effondrerait après une chute de l'euro par exemple, le candidat s'étant visiblement imposé de lui-même un minimum d'initiatives verbales, ce qui a eu au moins le mérite d'éviter de passer à la faute, ce qui ne fut pas le cas de tout le monde. Donc un discours tout en retenue pour un candidat qui se sachant en danger médiatique ne devait commettre aucune faute. Et alors que l'on pouvait craindre une attitude par trop terne ou a contrario des attaques mal contenues, il nous fut donné de voir une belle maîtrise doublée d'un sans faute.

Suit juste derrière François Fillon un Jean-Luc Mélanchon décidément très en verve, qui aura su remplir tout l'écran et captiver l'auditoire et qui, si ce n'avait été tout ces pics et déclarations intempestives, aurait pu se voir attribuer aussi un sans faute. Il reste que son programme fut difficile à retenir et que le téléspectateur moyen serait bien en peine d'en parler au bout de plusieurs semaines. Les auditeurs attentifs auront finalement retenu pêle-mêle qu'il sortirait de l'OTAN, point très incohérent pour quelqu'un qui souhaite rester dans l'Union, et qu'il existerait une ONG du nom d'ANTICOR, dont on se demande ce que cela faisait dans son discours. Les journalistes plus éclairés auront compris qu'il profite des attaques qui apparaissent jour après jour contre les finances d'Emmanuel Macron et l'on comprend dès lors que ce dernier ait pu exploser à un moment donné, à la surprise générale. Reste pour Mélanchon que sa confuse VIème République avec "constituante" n'aura pas été l'explication la plus claire de la soirée. Pour le reste, noter certaine incohérences serait entrer dans le programme du candidat, aussi nous ne le ferons pas, nous cantonnant à la forme du discours dans laquelle Jean-Luc Mélanchon a clairement montré qu'il pouvait être le candidat le plus redoutable de la gauche, surtout lorsque l'on voit la prestation de ses 2 acolytes, l'un à l'arrêt, l'autre en marche.

Après Jean-Luc Mélanchon on trouve dans notre classement  Marine Le Pen, qui, il faut bien le dire est la révélation de cette campagne puisque les sondages la placent largement en tête pour le premier tour. Seule candidate "féminine" de calibre à se présenter à la présidentielle elle recueille de plus en plus l'assentiment du vote féminin lassé de la gauchitude ambiante. Cela dit, la candidate de la droite nationale semble avoir craint elle aussi l'excès de verve et restera toute la soirée dans la retenue, attitude qu'on ne lui connaissait guère. Le résultat en sera qu'elle aurait pu finir première et qu'elle n'accède qu'à la 3ème marche du podium. Toujours prompte à la réplique elle n'a pas manqué de tacler ses adversaires, mais là encore sans excès. On pouvait s'attendre à plus de pugnacité. Et pour ce qui est de son programme on aura bien retenu sa petite imitation de Trump sur la sortie de l'Union "si les Français le veulent" via un référendum, qui avait tout à la fois quelque chose d'historique et de cocasse : "je rends le pouvoir aux Français".D'ailleurs si certains y voient du Trump les Français pourrait bien y voir du Jeanne d'Arc qui redonne au Roi les clefs du royaume via le ciel. Reste à la candidate à concrétiser l'accessit. Et là, vu le scrutin à deux tours, ce sera une autre paire de manches !

Après Marine Le Pen et relativement loin derrière on trouve Emmanuel Macron et Benoït Hamon. Le premier d'ordinaire assez à l'aise dans ses discours où dans ses prestations télévisées n'a pas réellement brillé lorsqu'il a été confronté à ses adversaires : tendu, imprécis, il est même allé à  la faute en explosant à un moment, ce qui prouve qu'il ne maîtrise pas encore les joutes politiques. Il est vrai que l'évocation malveillante par Jean-Luc Mélanchon d'ANTICOR, l'organisme indépendant de dénonciation de la corruption, l'a certainement déstabilisé alors que la presse sur internet multiplie les déclarations d'affaires le concernant. Doit-on trouver là les raisons de sa conclusion très peu convaincante au cours de laquelle il a parfois semblé avoir du mal à trouver ses mots? il est clair que ce brillant personnage reste un peu jeune dans le métier et l'on ne l'imagine pas encore affronter Trump ou Poutine dans des négociations tendues. Maintenant il s'en tire légèrement mieux qu'un Benoît Hamon, encore tout étonné d'avoir été sélectionné... Il était le dissident du gouvernement et se retrouve l'officiel du socialisme "canal historique". Comprend qui peut. Dans son cas où l'on sent un manque de conviction qui pourrait s'estomper dans l'avenir, c'est plus son programme incompréhensible qui l'a handicapé. On s'attendait à quelque chose de simple comme "je conserve tous les grands principes du socialisme et y ajoute mes mesures phares, les 32 heures et le revenu pour tous", mais il n'en fut rien. Le programme, sans entrer dans le détail est confus et sent la promesse du renoncement. Il est difficile de jouer une pièce dont on ne connait pas le texte, surtout avec si peu de répétitions...



Méthode et conclusion
Disons le tout de suite la notation que nous avons choisie est très "non linéaire", et on le voit particulièrement avec l'éloignement en point entre le premier groupe et le second,  et donne l'avantage à ceux qui ont essayé de se retenir tout en étant précis, ou à l'opposé à ceux qui ont rivalisé de volubilité alors qu'à contrario notre notation accable quelque peu toute imprécision ou quelque amateurisme ponctué d'erreurs mal placées. Et non seulement elle est très "non linéaire" mais elle provoque aussi des "doubles peines" qui accroissent cette non-linéarité.  Ainsi Emmanuel Macron "explosant" lorsqu'il croit avoir entendu dans les propos de Marine Le Pen l'once d'un reproche concernant, peut-être, les nombreuses affaires dont la presse commencerait à l'accabler, se traduit par des pertes de points sur plusieurs critères : tenue sur scène, hors sujet, etc... Concernant notre notation, chacun pourra l'évaluer, voire la modifier, que ce soit sur les chiffres eux-mêmes ou les critères d'évluation,  mais nous sommes très étonnés de constater que l'effet initial donné par chaque candidat sur l'auditoire est bien celui qui perdure dans le temps et se traduit dans nos notes, même si celles-ci l'amplifient. On aura beau changer certains points, il sera difficile de faire descendre François Filon en dessous de 14, et l'on sera bien en peine de faire remonter Emmanuel Macron au dessus de 12.. Et l'avis moyen que l'on voit apparaitre aujourd'hui dans la presse, un François Fillon plutôt bien et largement mieux que prévu, un Jean-Luc Mélanchon percutant et qui pourrait bien faire la surprise à gauche, une Marine le Pen toute en retenue, ce qui lui est rare, un Emmanuel Macron dont on n'aurait pas imaginé qu'il manqua à ce point de maîtrise et enfin un Benoît Hamon tout juste sorti du chapeau de la primaire à gauche (et déjà lâché par les siens) et déjà aux prises à la dilution voire au renoncement de son programme dont on n'a pas très bien compris s'il conserve ou s'il abandonne, voire amande les 32 heures et le "revenu pour tous", l'avis moyen donc sort naturellement de notre petite grille d'analyse, qui ne vaut que pour la forme et pas le fond. Gageons que les candidats qui n'auront pas atteint  les sommets sauront se rattraper, car tous sont d'excellents communicateurs lorsque l'environnement leur est plus favorable. Et certains peuvent apprendre très vite, comme Emmanuel Macron et Benoît Hamon. Mais  observons toutefois que la politique est affaire d'expérience et qu'après l'épisode Hollande, un président qui aurait quelque solide tenue et qui connaitrait les arcanes du pouvoir tout en ayant une bonne vision stratégique serait un plus pour ce pays bien malmené.
 
   
                                                                 
Bertrand Villeret
ConsultingNewsline


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