Carnets de voyage
Octobre 2010 Françoise Thibaut Maud et Mathis C’est fascinant : elle extrait ses mains
gantées de leurs
étuis de chevreau gris, étroit et brillant, en tirant sur
le bout des doigts, un
à un, de manière lente, élégante et
mécanique. La main
gauche d’abord : le petit doigt, puis l’annulaire, le majeur, l’index et enfin
le pouce. Posément,
puis elle étale le gant vide sur ses genoux et le lisse, le rendant plat comme une sole. Le
manège recommence
avec la main droite, jusqu’à ce que le gant rejoigne son camarade, sur la jupe de tweed gris,
tandis qu’elle débite
son identité après un désinvolte « bonjour
cher monsieur ». Il
regarde, fasciné. Il regarde ce lent manège
précautionneux. Son
regard est tellement fixé sur les gants posés sur la jupe, maintenant aplatis et
soigneusement pliés, sous la main de leur propriétaire,
qu’elle se croit obligée de donner une explication, davantage
destinée à rompre le silence qu’à vraiment expliquer.
Quantorg 2010— Je porte toujours des gants en ville, tout est tellement sale et poisseux… et cela protège des microbes qui s’accrochent aux mains… — Vous avez raison. Il s’est repris, se redresse sur son fauteuil de bureau, la regarde bien en face, droit dans les yeux, comme on le lui a appris lors de sa formation d’agent bancaire : il paraît que cela met le client en confiance, et qu’après un coup d’oeil pareil, il vous confie toutes ses économies, même celles qu’il n’a pas encore, sans barguigner. Mais il n’a jamais pu vérifier vraiment cette affirmation; le métier est plutôt difficile, il trouve, et les miracles sont rares. ConsultingNewsLine Extraits de Maud et Mathis : Copyright Françoise Thibaut 2010 All rights reserved Reproduction interdite |
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