Techno Juillet 2005 ITER ou le mythe de Prométhée enfin sur Terre Le Projet ITER de Fusion Thermonucléaire contrôlée à Cadarache Par J.P.Husson, Physicien et consultant d'Essor Europe Le projet ITER de réacteur à fusion thermonucléaire contrôlée vient enfin d’être approuvé le 28 Juin dernier à Moscou par les représentants des 6 pays intéressés par le développement à long terme de ce type particulier d’énergie nucléaire. Après de longues négociations, l’Union Européenne, la Chine, la Corée du Sud, les Etats-Unis, le Japon et la Fédération de Russie, se sont finalement accordés sur la localisation de cette machine expérimentale à Cadarache en région Provence. L’Europe avec le JET (Joint European Torus) à Culham (Royaume-Uni) et Tore Supra (à Cadarache), les Etats-Unis, la Russie et le Japon sont engagés depuis longtemps dans la recherche sur la fusion contrôlée. Les performances incontestables des chercheurs européens et des machines installées en Europe leur donnent dans cette recherche particulière un avantage compétitif majeur. ITER, équipement lourd de recherche, n’est pas un réacteur au sens strict mais il constitue une étape majeure sur la longue marche qui, entreprise depuis une cinquantaine d’années, devrait mener ultérieurement (2040-2050) vers la réalisation d’un « vrai » réacteur à fusion contrôlée. En effet, ITER tel qu’il est proposé devrait mener à la réalisation d’un pré démonstrateur, préalable indispensable au démonstrateur industriel qui devra valider les options scientifiques et techniques choisies pour la production d’énergie ; à ce jour, en effet, le problème très complexe de l’extraction de l’énergie de ce type de machine n’est pas résolu. La production en quantité de neutrons rapides utilisables dans un réacteur rapide classique à fission, pourrait permettre de proposer un réacteur hybride fusion-fission (ce qui résoudrait l’extraction d’énergie) Rappelons très brièvement les aspects fondamentaux de la fusion nucléaire et de la technique utilisée aujourd’hui pour atteindre les conditions d’ignition (déclenchement de la réaction thermonucléaire et son auto entretien ). La fusion de deux noyaux légers (tels que ceux d’hydrogène), comme la fission d’un noyau lourd (comme celui d’Uranium 235), libère de l’énergie; les réserves d’uranium ne sont pas inépuisables, celles des atomes légers comme l’hydrogène ou l’hélium peuvent être considérées comme inépuisables. La réaction de fusion considérée comme base pour les recherches engagées est : D + T---> n + He + 17,6 MeV3 (où D et T sont le deutérium et le tritium -isotopes 2 et 3 de l’hydrogène- et n + He, un neutron + un noyau d’hélium). L’énergie libérée de 17,6MeV l’est sous forme d’énergie cinétique conférée au neutron (14MeV) et au noyau d’Hélium (3,6MeV). Les neutrons produits (ils sont dits rapides) sont utilisables pour initier d’autres réactions de fusion libérant à leur tour de l’énergie. La technique utilisée actuellement est celle du Tokomak inventée par les physiciens russes dans les années (60-70) est extrêmement délicate à réaliser. Il s’agit de d’injecter et de confiner dans une enceinte en acier, un plasma chaud et dense de noyaux de Deutérium et de Tritium (à environ 100 millions de degrés C, température interne du Soleil). Le confinement des noyaux est assuré par un champ magnétique toroïdal qui enserre l’ensemble des noyaux légers de D et de T dans une sorte de « chambre à air magnétique » (un tore) et qui les maintient hors contact des parois de la machine. On devine que la densité du plasma (n.) sa température (T) et son temps () de confinement sont des données essentielles pour évaluer la qualité du plasma et sa capacité à permettre l’entretien des réactions de fusion; c’est le fameux critère de Lawson qui exprime la condition d’ignition d’une réaction de fusion : n.T.tau > 10 puissance 21 keV par metre cube x seconde En pratique la densité n du plasma doit être de l’ordre de 10 puissance 20 m-3, la température T de l’ordre de 100 à 200 millions de degrés (10-20keV), et tau le temps de décroissance de l’énergie du plasma (lorsque les sources qui l’alimententsont coupées) typiquement plusieurs centaines de millisecondes ; ce temps ne doit pas être confondu avec la durée de la décharge électrique dans le circuit magnétique (le record est pour ToreSupra de 6mn30s et 1MJoule injecté et extrait). Ce critère a presque été satisfait dans JET et par Tore Supra mais dans des temps encore trop courts. Le coût total du projet est estimé à environ 10 milliards € étalés sur 10 ans (construction 4,7 milliards €, fonctionnement 4,8 milliards €, région 0,5 milliards €) répartis à hauteur de 40% pour l’UE, 10% pour la France, et 5 fois 10% pour les 5 autres partenaires. La durée de construction est estimée à 10 ans (2015-2016) et la durée d’utilisation elle aussi estimée aux environs de 10ans (2026-2030) avec un nombre de scientifiques voisin du millier sans compter les emplois annexes induits. Jean Pierre Husson Docteur en Physique nucléaire Consultant, Essor Europe ITER
Pour Info: Interview: Jean Pierre Husson Sites: www.iter.org/index.htm www-fusion-magnetique.cea.fr/index.html www.fusion-eur.org/fusion_cd/iter.htm http://itpa.ipp.mpg.de/ITER_Web_Offline/contents1.html www-fusion-magnetique.cea.fr/common/eur-cea.htm Ouvrages: "Les déconvenues de Prométhée-CEA" J.L.Bobin Infos utiles, 2000 "La fusion controlée" P.H.Rebut Odile Jacob (1999) "La fusion nuclaire, une source d'énergie poutr l'avenir?" Jean Adam Pour La Science, Diffusion Belin, Paris 1993 "La Fusion thermonucléaire contrôlée par confinement magnétique" Série Scientifique, Collection CEA Masson;, Paris 1984 Copyright
Jean Pierre Husson 2005
pour ConsultingNewsLine All rights reserved Reproduction interdite |
|
|