La Chronique d'Olivier Chaduteau
Sept-Oct 2005 Assurer
la Veille et l'Analyse de marché
De nos jours, un
cabinet doit pouvoir en permanence aligner son environnement interne
avec son environnement externe afin de développer – de
façon rentable – un service différencié qui
corresponde aux attentes des clients et à l'évolution
technique, réglementaire, législative et technologique du
marché
Olivier
Chaduteau Market Intelligence La démarche de veille et d'analyse du marché (Market Intelligence) doit permettre de répondre à trois objectifs primordiaux : - la compréhension du marché (réglementation, taille et spécificités du ou des marché(s) ciblé(s), clients, prospects, prescripteurs...) ; - la compréhension de la concurrence (actuelle et potentielle, savoir anticiper face à de nouveaux entrants...) ; - la compréhension du positionnement du cabinet (atouts, faiblesses, facteurs différenciants, proposition de valeur...). Comprendre le marché Concurrents mis à part (auxquels nous consacrons un paragraphe à part plus bas), cinq domaines de veille doivent être analysés lorsqu'il s'agit de comprendre le marché dans lequel un cabinet souhaite évoluer : - les clients/prospects/prescripteurs, - la méthodologie et ses évolutions - le réglementaire et législatif, - l'économique et le géopolitique, - la technologie. Ce sont ces éléments qui permettront, chacun à son niveau et de façon plus ou moins développée ou formalisée (notamment suivant la taille du cabinet et de son marché cible – PME vs grands groupes ; régional vs international ; cotées vs non cotées...) d'anticiper des mouvements et évolutions du marché et de trouver de nouveaux axes ou domaines de développement (nouvelles offres notamment). Connaître les attentes des clients potentiels s'avère primordial pour définir/ajuster une offre qui corresponde à des besoins réels et non à un désir du cabinet d'utiliser stricto sensu les compétences à disposition en interne. C'est pouvoir réaliser l'adéquation nécessaire entre les compétences, les offres, et le marché, et ce, d'autant plus que les exigences des clients augmentent et se complexifient. Le cabinet de services professionnels doit donc identifier les besoins potentiels à travers la lecture de la presse généraliste et spécialisée, des rapports d'activité, des brochures, des plaquettes et sites internet des secteurs/clients concernés, mais aussi consulter des bases de données ou mettre en place des études de marché, des analyses clients, des études de satisfaction quantitatives ou qualitatives ou encore créer des indicateurs de tendances, etc. D'ailleurs, concernant les études ou les baromètres, l'avantage peut être triple : non seulement, une étude est un outil de connaissance du marché, mais c'est également un outil de communication sur lequel développer la notoriété du cabinet à travers des RP (relations publiques/relations presse) ciblées et un outil de développement commercial, de support de vente. Enfin, le contact avec les associations professionnelles, les conférences, ou encore les salons des marchés cibles est très enrichissant aussi bien pour améliorer sa connaissance et ses contacts/prescripteurs avec les entreprises que pour gérer sa veille concurrentielle d'ailleurs. A titre de moyen mnémotechnique, bien connaître un marché (et être connu ensuite de celui-ci), c'est respecter l'acronyme EMEIA : c'est-à-dire, connaître : - Enjeux, - Médias, - Evénements, - Idées/Innovations, - Acteurs. Si vous connaissez précisément ces cinq éléments, alors vous pouvez développer une réelle stratégie d'attaque du marché, établir un plan d'action spécifique, optimiser votre temps de développement et vous focaliser sur ce qui fait le ROI (Return On Investment) ! Enfin, la notion de réseau de prescripteurs est indispensable car elle permet de comprendre les aspects relationnels et jeux de pouvoir du métier et ainsi d'utiliser la « nécessaire influence » (lobbying) au développement du cabinet. L'utilisation du réseau de prescripteurs donnera lieu à un autre article, tant elle est spécifique et primordiale. La veille sur les nouvelles pratiques, les nouveaux montages, les nouvelles possibilités technologiques ou techniques, auprès d'universitaires, de groupes de travail et réflexion internes, auprès du législateur, auprès de ses propres concurrents, ou à travers des ouvrages techniques est essentielle car elle permet, non seulement de s'améliorer et d'apporter une prestation à la pointe de la technique (service de base tout de même !), mais aussi de pouvoir réfléchir à de nouvelles offres qui peuvent être créées et proposées ensuite à ses clients/prospects de manière proactive et personnalisée. Les mouvements de l'économie et de la géopolitique peuvent avoir également un impact majeur sur les clients des cabinets, en terme de suractivité ou de sous-activité qu'il faut pouvoir anticiper, suivre, sans pour autant investir trop dans la recherche ou l'analyse de ces données. Une fois encore, la taille du cabinet et les marchés ciblés détermineront l'ampleur de l'investissement nécessaire en temps et argent sur ce type de veille. Enfin, l'évolution de la technologie est un phénomène important car elle permet un accès à l'information et donc au savoir et à la technique 24 heures sur 24 et ce, partout dans le monde. Elle va permettre de servir plus vite et plus loin, en redéfinissant les barrières de temps et d'espace et donc la relation elle-même. Cela crée des opportunités de servir mieux ou sur d'autres « territoires » davantage de clients, ou de standardiser une partie de sa connaissance, mais a contrario, cela crée aussi des risques de voir de nouveaux entrants opérer sur un « territoire » sur lequel vous ne les attendiez pas. Les prestations à faible valeur ajoutée vont devenir de plus en plus banalisées, automatisées, standardisées, informatisées, laissant place aux prestations à forte valeur ajoutée délivrées par le professionnel et son équipe et sur lesquelles aucune technique n'entre en concurrence. Le modèle économique et relationnel des cabinets s'en trouve complètement changé. Au-delà de la nécessaire connaissance et compréhension de la réglementation ou des cibles potentielles, il est primordial de connaître les concurrents existants et potentiels pour être capable de se différencier. Connaître la concurrence Identifier les concurrents existants constitue un objectif important – pas toujours évident – de la démarche de veille et d'analyse du marché. Qui est notre concurrent ? Sur quelle offre, compétence ou marché est-il concurrent ? Cette première étape pose souvent déjà problème tant il est difficile de définir ses concurrents si l'on ne s'est pas défini soi-même (quelles compétences, quelles offres, quels marchés pour quel positionnement ?). Dès lors, il faut s'attacher à analyser les facteurs desquels dépend la puissance concurrentielle d'un cabinet c'est-à-dire : - la qualité des prestations, - les spécialisations, - l'expérience (les références), - la réputation/marque, - le niveau de relationnel et le réseau du cabinet et de ses associés. L'analyse des sites web des cabinets peut fournir une idée assez précise du positionnement, des ressources, des secteurs cibles, des spécialisations, des forces et des valeurs ou de la culture des concurrents. Cette analyse permet de mettre en valeur des faiblesses sur lesquelles son propre cabinet devrait travailler. D'autre part, les publications (livres, brochures, plaquettes, manuels techniques) ou articles publiés dans la presse permettent d'identifier les « gourous » et les thèmes de focalisation précis d'un cabinet sur une problématique donnée. Enfin, plus spécifique, l'entretien systématique de nouvelles équipes recrutées arrivant de la concurrence ou le « debrief » avec un client suite à une mise en concurrence (gagnée ou perdue) peuvent apporter des informations de grande valeur. Au-delà des concurrents d'aujourd'hui, il faut toujours garder un œil sur demain pour pouvoir anticiper et s'adapter aux futurs concurrents. En effet, certains cabinets qui ne sont aujourd'hui que des cabinets « généralistes » peuvent, dans une stratégie définie, décider de se focaliser sur un segment de marché... le vôtre par exemple. Les mouvements de consolidation, les départs d'équipes, les fusions, la création de cabinets de niche, les domaines d'incompatibilités édictés par la Loi de sécurité financière ou le Sarbanes-Oxley Act... impliquent une redéfinition complète du paysage concurrentiel du marché du conseil au sens le plus large en France et à l'international. Dans une démarche marketing et stratégique globale, la veille et l'étude du marché vise in fine à aider à positionner le cabinet par rapport aux cibles et à son environnement réglementaire et concurrentiel. C'est donc le troisième objectif majeur. Connaître la position concurrentielle de mon cabinet Connaître ses clients est primordial dans l'évaluation de la performance du cabinet. En effet, pour être efficace dans son approche du marché, pour être capable d'aligner ses compétences et ses offres à ce marché, le cabinet de services professionnels doit être capable d'évaluer ses propres forces et faiblesses notamment en analysant son portefeuille clients : type de clients ? Secteur d'activité ? Taille ? Type de mission ? Honoraires ? Rentabilité par segment/client ? Opportunités de chaînage ? Transversalité réussie ? Liste des références ? Mais aussi la force des ses équipes (compétences, relationnel, commercial, réseau...). Cet exercice nécessite certes un investissement en temps et en hommes, mais il permet véritablement d'identifier ce que les clients valorisent et, in fine, de définir la proposition de valeur du cabinet. Connaître et comprendre ses facteurs différenciants est assez rare. Aux questions : « Pourquoi vos clients vous achètent-ils ? Qu'est-ce qui a déterminé leur choix en votre faveur ou en votre défaveur ? », la réponse est souvent peu claire. En fait, la différenciation de l'offre d'un cabinet doit se faire par l'expertise technique, la valeur ajoutée, la qualité du service, mais aussi par la marque, la vitesse d'exécution, les valeurs, les équipes et la relation client et en aucun cas par le coût. Pourquoi ? Parce que la réduction de coûts est imitable à court terme, et donc, non différenciante. De plus, elle implique une course à la perte de marge, qui n’est pas le but recherché pour une croissance rentable et durable du cabinet. Il devient alors nécessaire de procéder à une comparaison (« benchmarking ») de ces différents critères avec les concurrents afin d'identifier ce qui peut être valorisé pour le cabinet dans une situation de mise en concurrence donnée. Pour cela, une analyse préalable sur les facteurs-clefs de succès du marché cible est nécessaire. Ainsi, connaître son positionnement, ses facteurs différenciants, ses concurrents et l'évolution des marchés est primordial à sa survie. Les démarches de développement doivent être planifiées, focalisées, suivies et demander un minimum de temps (par définition non facturable) aux professionnels. Pour ce faire, la démarche de veille et d'analyse du marché est un processus itératif indispensable qu'il faut savoir définir, mettre en place, alimenter, analyser, suivre... une fois encore en y passant un minimum de temps avec un souci pratique de prises de décision et d'actions qui doivent obligatoirement en découler et non pas de chantier lourd, complexe et coûteux. Associé, fondateur du cabinet DayOne Pour Info: http://www.dayone.fr Retour: La Chronique d'Olivier Chaduteau Les Chroniques de ConsultingNewsLine: retour Copyright
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