Carnets de voyage
Juillet-août 2007
Le Dossier Pouchkine
Le Quartier Français
par Jean-François Pré



Côté communication, le foot n’est pas en reste. On peut
même dire qu’il communique tout seul. Il n’y a qu’à voir
la mobilisation des médias autour de l’évènement. En ce
jour de finale, le Pape pourrait mourir qu’on en parlerait à
peine. Et encore, c’est un mauvais exemple car le Pape,
aujourd’hui, ne concerne plus que quelques familles catholiques
comme la mienne. On se demande d’ailleurs si
catholique ne rime pas avec hérétique ! Le gouvernement
a beau se porter garant des valeurs laïques, il n’en demeure
pas moins que les églises et autres cathédrales font
régulièrement l’objet d’attentats dont personne ne semble
plus s’émouvoir.
Mais ceci est un autre débat.
A journée exceptionnelle, comportement exceptionnel.
Je me suis donc rendu au BON pour faire valider mon
ticket de Derby. Je n’aime pas parier en ligne. C’est trop
impersonnel. On n’a pas la sensation de gagner… ni celle
de perdre, ce qui est infiniment plus grave. Moi, j’aime
toucher le papier. Je n’ai pas fait d’études étymologiques
mais à mon avis, l’emploi du verbe toucher (dans
l’expression "toucher un gagnant" par exemple) ne doit
rien au hasard. Jamais aucun ordinateur ne remplacera la
perception tactile. Au début du siècle, les « fabricants
d’idées » ont cru que les gens allaient se mettre à lire sur
leur portable… erreur monumentale !
Nul ne pourra jamais se passer du support papier.
Je ne suis pas le seul à fréquenter les BON. Les paris en
ligne sont un palliatif pour flambeurs pressés, mais ceux
qui ont le temps (depuis la loi des trente heures, ils sont de
plus en plus nombreux) préfèrent l’atmosphère ouatée
d’un BON trois étoiles à la froideur virtuelle des cristaux
liquides. Les BON n’ont strictement rien à voir avec les
bars-tabac PMU d’antan, bouges bruyants et enfumés où
aucune femme respectable n’osait s’aventurer. Comme les
restaurants, ils sont classés par étoiles. Celui qui se trouve
en bas de chez moi en comporte trois. C’est le maximum.
Contrairement aux restaurants, vous ne payez pas
l’addition plus cher… et vous ne payez même aucune addition.
Toutes les consommations y sont gratuites. C’est le
prélèvement effectué sur les enjeux qui est supérieur dans
les BON de luxe. Ingénieux, non ? Dans un BON trois
étoiles, les gagnants sont (un tout petit peu) moins riches
que dans un BON sans étoile, ce dernier garantissant
néanmoins un confort basique, une grande propreté et une
fréquentation correcte. Cela dit, les trois étoiles… c’est
quand même autre chose.
Il faut que je vous décrive le "mien".
Il se situe en plein Quartier Français où, sans vouloir
être chauvin, on trouve les meilleurs BON. D’abord, une
vaste entrée avec un vestibule calfeutré et quelques hôtesses
pour s’occuper du vestiaire. Ensuite, le salon principal
donne le ton. Une très élégante marqueterie en guise de
parquet, des tentures de shantung et de lourds rideaux qui
protègent les murs écran en dehors des heures de courses.
Une couleur claire oscillant entre le gris et le blanc cassé
pour ne pas ressembler à un lupanar ou à un cercle mal
famé. Sur les murs qui ne sont pas dévolus à la projection
des courses en 3D, trônent quelques maîtres anglais du
XIXème siècle qui ont beaucoup apporté à la chose hippique
: Stubbs, Munnings, Constable et consort… Des
copies, selon toute vraisemblance. Les fauteuils sont
confortables mais ils respectent l’atmosphère studieuse,
tout comme les tables rondes en noyer. On n’est pas dans
une fumerie d’opium ! Le bar est massif, à l’anglaise. On
y sert le champagne à discrétion, comme tous les vins et
alcools ainsi que, bien sûr, les boissons non alcoolisées.
Mon BON est réputé pour le choix de ses thés, ainsi que
des pâtisseries qui les accompagnent. Le tout aux frais de
la princesse ou plutôt du turfiste. Au moins, si vous avez
perdu serez-vous consolé de savoir que vous avez bu sur le
compte des gagnants.
Un principe astucieux auquel il fallait penser !

Jean-François Pré
Le dossier Pouchkine
Editions Publibook, Paris 2007

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Copyright Jean-François Pré 2007
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